Comment les économistes savent-ils que le téléspectateur est moins heureux à trop regarder la télé ? Parce qu’ils s’intéressent au bonheur et à ses mensurations. L’économie du bonheur est même devenue une sous-discipline académique reconnue. En simplifiant, elle propose une mesure du bien-être subjective en demandant aux individus s’ils sont dans l’ensemble satisfait de leur vie. Par exemple, sur une échelle croissante de satisfaction de 0 à 10. Elle cherche ensuite à établir comment cet indice varie selon le revenu, l’âge, le niveau d’étude, la situation familiale, le nombre d’amis, la richesse du pays, etc.

Dans un article intitulé « Does Watching TV Make Us Happy ? » (La télévision nous rend-elle heureux ?), trois économistes de l’Université de Zurich ont eu l’idée d’introduire le temps passé à regarder la télévision parmi les variables explicatives de la satisfaction de la vie. Leurs données portent sur près de 50 000 individus répartis dans 22 pays européens.

Ils montrent, sur la base de l’échelle de satisfaction exprimée de 0 à 10, que les gros consommateurs de télévision (plus de 2,5 heures par jour) se caractérisent par une baisse de satisfaction de 0,2 par rapport à ceux qui regardent peu la télévision (moins de 30 minutes par jour). Pour donner un point de comparaison, cette baisse relative de satisfaction représente un peu plus du tiers de celle observée pour les personnes seules par rapport à celles en couple, ou encore le cinquième de celle observée pour les personnes au chômage par rapport à celles qui ont du travail. La baisse de satisfaction de la vie de 0,2 pour les gros consommateurs de télé n’est donc pas anecdotique.