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Accueil » Paroles d'experts » Nadia Maïzi – “Il faut absolument un travail de suivi après une telle COP.”
Dans un entretien donné aux Échos le 13 décembre dernier, Nadia Maïzi, Professeur à Mines Paris - PSL et co-autrice principale du 6ème rapport du GIEC, a analysé les enjeux de l'accord qui a été adopté le 12 décembre 2023 à Dubaï à l'issue de la COP28. Une avancée réelle pour la directrice de TTI.5 - The Transition Institute .5, mais dont la portée ne sera confirmée qu'avec un suivi des engagements pris par les États.
Quelle est la portée de l’accord adopté ce jour à Dubaï ?
Il y a deux façons de voir cet accord. Du point de vue du citoyen qui voit les choses d’un peu loin, il y a une forme de satisfaction de voir la question des ressources fossiles entrer enfin dans la COP, c’est une avancée extraordinaire. Mais en tant que membre du GIEC, nous avons alerté depuis longtemps sur le fait que le volume actuel des installations pétrolières n’est déjà plus compatible avec les 1,5 °C de l’accord de Paris. Aujourd’hui, je suis un peu entre ces deux perspectives. Il y a des progrès, et en même temps, nous sommes dans une dynamique qui n’est pas suffisamment rapide pour répondre aux enjeux tels que nous, scientifiques, nous les voyons.
Cet accord n’est-il pas malgré tout une reconnaissance du travail des scientifiques ?
Oui tout à fait, et le signal est d’autant plus fort que cette COP s’est tenue dans une région du monde où l’enjeu économique de l’exploitation des ressources fossiles est majeur. L’apport de la science est bien pris en compte mais nous, les scientifiques, nous restons frustrés car nous disons bien plus que ce que dit l’accord de la COP28. Notre rôle, c’est de pousser bien au-delà de ces recommandations. Mais je n’ai aucune critique à faire sur la formulation du texte, car il faut effectivement tenir compte des pays dont les économies reposent sur ces ressources fossiles et qui pour certains, en ont besoin pour accéder au développement.
La COP, c’est un peu du théâtre, c’est que vous voulez dire ?
Ce que je dis, c’est qu’il faut se méfier de ces grandes déclarations, tout en les poussant quand même parce que les COP sont un lieu de discussion qui rassemble tout le monde. Qu’est-ce qu’il en serait si nous n’avions même plus ces événements ? Dans une COP, tout se déroule sur un temps très court, avec des textes qui ne sont pas contraignants, où chacun prend un peu ce qui l’arrange. Il faut donc absolument un travail de suivi après, que l’on a un peu tendance à oublier. De la même façon, de plus en plus de pays ont dans leurs lois des engagements pour le climat, des villes et des entreprises s’engagent aussi de leur côté, mais la tendance est toujours haussière en termes de gaz à effet de serre. Voilà bien le décalage que nous devons garder en tête.
Faut-il garder malgré tout l’objectif des 1,5 °C ? Restez-vous optimiste ?
Il faut toujours être plus ambitieux pour viser quelque chose de raisonnable. L’ambition de l’accord de Paris est très haute. 2030, c’est demain, or en six ans, qu’est-ce qu’on peut transformer de fondamental, notamment dans le domaine de l’énergie ? Il y a une forme d’infaisabilité technique et physique. Malgré tout, il faut garder l’objectif des 1,5 ° et envisager ce qui se passerait avec des trajectoires de 2 ou 2,5 °C. Il faut faire les deux.
Du 20.03.2025 au 29.01.2026
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